Article écrit par Olivier Laquinte

Une invitation de Mélanie Joly, ministre du développement économique et des langues officielles

J’ai été invité par l’équipe de Mélanie Joly à une table ronde sur l’innovation, à titre de président de Talsom. J’en ai toutefois profité pour parler du RFSPI et des enjeux reliés à notre secteur. Trois questions nous étaient proposées afin de se préparer.

  • Quels sont les nouveaux besoins et les nouvelles opportunités pour votre région et votre secteur d’activité ?
  • Comment votre région et votre secteur d’activités se positionne ou compte se positionner par rapport à l’adoption de nouveaux modèles d’affaire ?
  • Quelles seraient les interventions les plus pertinentes que le gouvernement pourrait mettre en place pour s’assurer d’une relance économique pour le bénéfice de votre région et de votre secteur ? Pensons notamment à Montréal.

 Voici l’essentiel du propos que j’avais préparé…

Mon nom est Olivier Laquinte. J’ai fondé Talsom il y a 10 ans, une firme de consultation en management. De la stratégie à l’exécution, en utilisant l’innovation sous toutes ses formes, nous aidons nos clients à comprendre, définir, planifier et exécuter leur transformation dans un monde désormais digital. Au-delà sur volet commercial, c’est toute la chaîne de valeur des entreprises que nous transformons.

Au Québec, notre secteur génère 6% du PIB, soit 24,4G$, et emploie 337k personnes. La moitié de cela est généré par des entreprises indépendantes.

Je suis aussi un des cofondateurs du Regroupement des Firmes de Services Professionnels Indépendantes, le RFSPI. Le Regroupement, fort de 200 entreprises représentant tous les sous-secteurs de l’économie du savoir, a comme objectif de valoriser l’entrepreneuriat dans le secteur des services professionnels. À court terme, nous voulons positionner les firmes locales comme étant des acteurs clés dans la transformation de notre économie.

Vous nous avez posé 3 questions autour des enjeux, opportunités et de la posture des entreprises de notre secteur à travers et au sortir de la crise.

Cela étant dit, et pour en revenir à votre question, je préfère parler des opportunités plutôt que de besoins. L’opportunité, c’est de se servir de la nécessaire transformation des organisations pour développer des compétences distinctives chez les entreprises de l’économie du savoir. L’opportunité qui se présente devant nous est de devenir les leaders dans le monde quand vient le temps d’accompagner les entreprises dans leurs transformations. Devenir les leaders en innovation. On met souvent l’emphase sur le résultat des innovations, c’est-à-dire un produit, un service ou un procédé. Or, l’innovation est avant tout un processus. Pour permettre l’émergence des innovations, nous devons investir en amont, dans le développement des compétences, la mise en place d’outils et l’accompagnement des entreprises. C’est justement le cœur du métier des entreprises de notre secteur et de Talsom.

Au fil des ans, un sous-investissement dans les technologies et le développement des compétences a créé une dette technologique et culturelle que les entreprises doivent combler afin de capitaliser sur les nouvelles technologies et pour innover. Les firmes du secteur des services professionnelles veulent être l’outil principal au remboursement de cette dette. Nous voulons être le vecteur à travers lequel les entreprises vont non seulement relancer leurs activités, mais capitaliser sur les apprentissages de la crise pour conquérir de nouveaux marchés.

Pour nous aider à y arriver, le gouvernement peut prendre 3 actions :

Avant tout, reconnaître l’apport des services professionnels indépendants à l’économie canadienne et se doter d’un objectif concret et ambitieux pour ce secteur.

Ensuite, valoriser l’achat local en matière de services professionnels à travers ses propres politiques d’approvisionnement publiques. Le gouvernement et ses sociétés de la couronne ont le pouvoir de servir de tremplin aux entreprises de services professionnels indépendantes. En se dotant d’une stratégie d’approvisionnement conséquente au développement d’une économie de savoir plus forte, le gouvernement contribuera directement au développement des entreprises du secteur.

Finalement, définir un programme d’aide directe qui permettra aux entreprises canadiennes, de toutes les industries, de se transformer et d’être plus fortes au sortir de la crise. Une transformation innovante se réalise en quatre étapes : La stratégie, la réflexion, la planification et la réalisation. À ce jour, la plupart des subventions mettent l’accent sur la réalisation. Paradoxalement, une démarche d’innovation et une transformation réussie passent inexorablement par une réflexion stratégique de qualité. Le gouvernement devrait donc mettre sur pied une subvention qui permet d’investir dans tout le travail en amont à la réalisation des transformations. Notez que le programme doit aller au-delà d’un crédit d’impôt, car il doit reconnaître la réalité dans laquelle vivent les entrepreneurs et les dirigeants. La crise actuelle, dont nous ne pouvons prédire la fin, a mis une pression à la fois sur les revenus et les liquidités des entreprises. Il est donc difficile, voire impossible pour ces mêmes dirigeants d’engager des sommes importantes dans une transformation innovante, même s’ils la savent nécessaire.

En priorisant l’entrepreneuriat local à travers la transformation des entreprises, le gouvernement aidera à créer une circularité de l’investissement qui permettra la création d’un cercle vertueux au travers duquel les organisations investissent dans une démarche d’innovation, qui leur permet de se transformer et de devenir plus performantes. Cette démarche, soutenue par des firmes de services professionnels indépendantes permet à ces dernières de développer encore davantage de compétences distinctives que nous pourrons exporter, et ainsi créer une économie du savoir encore plus forte.

Le dollar investi par le gouvernement s’en voit donc multiplié.